Imaginez un instant : un brevet déposé il y a plus de dix ans pourrait-il redessiner l’avenir d’une géante comme Uber ? Cette question, presque impensable, est aujourd’hui au cœur d’un litige fascinant entre Carma Technology, une startup visionnaire, et le titan du covoiturage. Plongez avec nous dans cette saga juridique où innovation, propriété intellectuelle et enjeux colossaux se rencontrent, et découvrez comment une bataille légale pourrait bouleverser non seulement Uber, mais tout un écosystème de startups dans le secteur des transports.

Une Bataille Juridique aux Racines Profondes

Depuis ses débuts, le monde des startups est un terrain fertile pour l’innovation, mais aussi pour les conflits. Carma Technology, fondée en 2007 par l’entrepreneur en série Sean O’Sullivan, a récemment relancé un débat qui couve depuis près d’une décennie. En déposant une plainte contre Uber devant un tribunal fédéral du Texas, Carma accuse le géant du covoiturage d’avoir enfreint cinq de ses brevets, tous liés à un système ingénieux de mise en relation entre passagers (ou colis) et capacités disponibles dans les véhicules. Ce concept, au cœur même du covoiturage moderne, pourrait aujourd’hui coûter cher à Uber.

La plainte, déposée début 2025, demande non seulement des dommages et intérêts, mais aussi une injonction permanente contre Uber, ainsi que des redevances obligatoires pour tout produit enfreignant ces brevets. Un tel verdict pourrait non seulement affecter les finances d’Uber, mais aussi redéfinir son modèle économique. Comment en est-on arrivé là ? Remontons le fil de cette histoire captivante.

Les Origines : Une Idée Visionnaire

Tout commence avec Sean O’Sullivan, un entrepreneur frustré par les embouteillages incessants. De cette frustration naît une idée : et si un système automatisé, utilisant les smartphones, pouvait coordonner conducteurs et passagers pour optimiser les trajets ? En 2007, il dépose un brevet – le numéro 7,840,427 – qui décrit un système de transport partagé capable de mettre en relation des véhicules avec des places libres et des utilisateurs suivant des itinéraires similaires. Ce brevet, accordé en 2010, pose les bases du covoiturage tel que nous le connaissons.

Sous le nom initial d’Avego, Carma lance une application dès 2008, coïncidant avec l’émergence de l’iPhone. Présentée lors de la conférence DEMO, l’application permet aux conducteurs d’accepter ou de refuser des demandes de trajet, notifie les passagers en temps réel et sécurise les paiements via un code PIN. À l’époque, l’objectif est clair : promouvoir le vrai covoiturage, proche du concept d’autopartage, et non un service de taxi déguisé.

Le covoiturage, selon la législation fédérale, c’est l’autopartage, pas un service de taxi.

Sean O’Sullivan, fondateur de Carma

Uber dans la Tourmente : Un Conflit qui Couve

En 2016, alors qu’Uber connaît une ascension fulgurante avec une valorisation de 66 milliards de dollars, Carma entre en contact avec le géant. Selon la plainte, des avocats de Carma alertent Uber sur l’utilisation potentiellement illégale de leurs brevets. À cette époque, Uber, fondé en 2009, domine déjà des centaines de villes à travers le monde, s’appuyant sur un modèle agressif d’expansion et des milliards levés en capital-risque. Mais un détail crucial manque à son arsenal : des brevets spécifiques au covoiturage.

Le hic ? Dès 2015, l’Office américain des brevets (USPTO) rejette une demande de brevet d’Uber, arguant qu’elle empiète sur des brevets existants, dont ceux de Carma. Entre 2016 et 2019, au moins quatre autres demandes d’Uber subissent le même sort. Face à ces refus, Uber abandonne certaines de ces initiatives, mais continue d’opérer, ce que Carma considère comme une violation claire de sa propriété intellectuelle.

Pourquoi un Délai de Neuf Ans ?

Si Carma détenait ces brevets, pourquoi avoir attendu près d’une décennie pour agir en justice ? La réponse réside dans la réalité des startups. Comme l’explique Sean O’Sullivan, les priorités initiales d’une jeune entreprise se concentrent sur la conquête du marché et la rentabilité, non sur des batailles juridiques. Les brevets servent avant tout de bouclier, protégeant une idée contre les géants aux poches profondes.

De plus, intenter un procès contre une entreprise comme Uber coûte cher – plus de 10 millions de dollars, selon O’Sullivan. Pendant des années, Carma, une structure modeste, se focalise sur la construction d’un business rentable, notamment via des partenariats comme celui avec Toyota. Ce n’est qu’en 2025, après des tentatives infructueuses de négociation, que Carma se résout à poursuivre Uber.

Il nous a fallu du temps pour accepter l’idée de devoir poursuivre Uber pour qu’ils réagissent.

Sean O’Sullivan, à propos du litige

Une Stratégie de Brevets Sophistiquée

Ce litige ne repose pas sur un simple brevet, mais sur une famille de 30 brevets interconnectés, tous rattachés à la date de dépôt initiale. Selon Larry Ashery, un avocat spécialisé en propriété intellectuelle, cette approche rend le cas complexe. Chaque brevet contient de multiples revendications, définissant les limites légales de l’invention. Uber devra défendre chaque point, une tâche ardue.

Pour contrer, Uber pourrait tenter d’invalider ces brevets, mais la solidité de la stratégie de Carma complique cette défense. Le géant a d’ailleurs déposé des motions procédurales en 2025, cherchant à déplacer le procès en Californie, où il est basé, plutôt qu’au Texas. Ce choix de juridiction pourrait influencer l’issue du conflit.

Carma Aujourd’hui : Un Pivot Réussi

Alors qu’Uber et ses concurrents redéfinissent le ridesharing comme un service de taxi, Carma choisit une autre voie. Après avoir abandonné son application de covoiturage en 2016, la startup se réinvente en appliquant sa technologie aux services de tarification routière. Depuis 2013, Carma aide les autorités de transport à gérer péages et voies rapides, optimisant l’occupation des véhicules pour réduire les coûts d’infrastructure.

Voici quelques applications concrètes de cette technologie :

  • Gestion des péages via une application mobile pour fluidifier le trafic.
  • Vérification de l’occupation des véhicules pour les voies réservées aux HOV (véhicules à occupation multiple).
  • Réduction des dépenses en infrastructures, jusqu’à 20 fois, selon Carma.

Aujourd’hui, Carma est rentable, mais ce litige, coûteux, teste sa détermination. Pour O’Sullivan, c’est une question de principe : protéger les droits des inventeurs face aux géants technologiques.

Les Enjeux pour Uber et au-delà

Si Carma l’emporte, Uber pourrait faire face à des redevances massives, une injonction limitant ses opérations, et des dommages financiers conséquents. Mais l’impact ne s’arrête pas là. O’Sullivan estime que 60 autres entreprises enfreignent potentiellement ces brevets. Pourquoi viser Uber en premier ? Parce qu’il est le leader, le symbole d’un secteur en pleine mutation.

Voici un aperçu des enjeux potentiels :

Aspect Impact sur Uber Impact sur l’Écosystème
Financier Royalties et dommages coûteux Augmentation des coûts pour d’autres startups
Opérationnel Injonction possible sur les services Redéfinition des modèles de covoiturage
Juridique Défense complexe des revendications Renforcement de la protection des brevets

Un Test pour le Système des Brevets

Ce litige dépasse le duel Carma-Uber. Il met en lumière une question cruciale : le système des brevets peut-il encore protéger les petits inventeurs face aux titans de la tech ? Pour O’Sullivan, la réponse est vitale. Si les géants peuvent ignorer les brevets sans conséquence, l’innovation risque de stagner, décourageant les entrepreneurs audacieux.

Ce cas pourrait redéfinir les règles du jeu, non seulement pour le transport partagé, mais pour toutes les startups. Il rappelle l’importance de la propriété intellectuelle dans un monde où la technologie évolue à une vitesse folle. Et si Carma gagne, d’autres entreprises pourraient suivre, lançant une vague de litiges dans le secteur.

Que Nous Réserve l’Avenir ?

Ce litige, encore en cours, est une saga à suivre de près. Pour Uber, l’enjeu est clair : protéger son modèle économique face à une menace juridique sans précédent. Pour Carma, c’est une bataille pour la reconnaissance de son innovation pionnière. Et pour les startups du monde entier, c’est un rappel que les brevets, bien que coûteux à défendre, restent un pilier de l’innovation.

Qu’adviendra-t-il de ce conflit ? Le tribunal du Texas apportera-t-il un verdict choc ? Et comment cela influencera-t-il l’avenir du covoiturage et des startups technologiques ? Une chose est sûre : cette histoire est loin d’être terminée, et ses répercussions pourraient façonner le paysage des transports pour les années à venir.

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Steven Soarez
Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.