Imaginez un homme qui a consacré sa vie à financer les innovations qui changent le monde, et qui, du jour au lendemain, découvre qu’il aura besoin de ces mêmes technologies pour continuer à s’exprimer. C’est l’histoire poignante de Jon Medved, figure emblématique de la scène venture capital israélienne.

Diagnostiqué avec la sclérose latérale amyotrophique (SLA), une maladie neurodégénérative implacable, ce pionnier a dû quitter brusquement la direction de sa société. Pourtant, loin de baisser les bras, il trouve dans son propre portefeuille d’investissements des outils qui vont transformer son quotidien.

Jon Medved et la révolution du venture capital en Israël

Jon Medved n’est pas un investisseur ordinaire. Arrivé en Israël dans les années 80 depuis la Californie, il a participé à la construction de ce qu’on appelle aujourd’hui la Startup Nation. Après avoir fondé et vendu plusieurs entreprises tech, il s’est tourné vers l’investissement.

En 2013, il crée OurCrowd, une plateforme qui démocratise l’accès au capital-risque. Contrairement aux fonds traditionnels réservés à une élite, OurCrowd ouvre ses deals à tout investisseur accrédité, quel que soit son pays. Résultat : plus de 240 000 membres dans 195 nations.

Cette approche a permis à des médecins, avocats ou simples passionnés de technologie de participer à la croissance de pépites comme Anthropic, Beyond Meat ou Lemonade. OurCrowd compte aujourd’hui près de 500 sociétés en portefeuille et une soixantaine de sorties réussies.

Un diagnostic brutal qui change tout

En octobre 2025, la nouvelle tombe comme un choc pour la communauté tech israélienne : Jon Medved annonce son retrait immédiat d’OurCrowd. La raison ? Un diagnostic de SLA.

Cette maladie attaque progressivement les neurones moteurs, entraînant une perte de contrôle musculaire. Chez Medved, les premiers symptômes ont touché la voix, rendant sa parole rauque et difficile – un signe atypique, car la maladie débute souvent par les membres.

Hospitalisé plusieurs semaines, il apprend la terrible vérité. Il n’existe pas de guérison, seulement des traitements pour ralentir l’évolution et améliorer la qualité de vie.

« Cela est arrivé assez soudainement. J’avais ressenti quelque chose d’étrange avant, mais on ne savait pas ce qui me touchait. »

Jon Medved

Cette confidence, donnée lors d’une interview probablement la dernière avec sa vraie voix, illustre le caractère imprévisible de la SLA.

La technologie au service d’une vie transformée

Ce qui rend cette histoire particulièrement émouvante, c’est l’ironie du destin. Pendant des années, Jon Medved a investi massivement dans la healthtech, sans imaginer qu’il en deviendrait un jour bénéficiaire direct.

Aujourd’hui, plusieurs startups de son portefeuille vont l’aider à affronter la progression de la maladie. La plus spectaculaire est sans doute la création d’un avatar numérique ultra-réaliste.

Ce double virtuel reproduit fidèlement son visage, ses expressions et surtout sa voix d’avant la maladie. Développé grâce à D-ID (spécialiste des agents et avatars IA), en partenariat avec ElevenLabs et la Scott-Morgan Foundation, cet outil permet aux patients SLA de continuer à communiquer naturellement.

« Cela va préserver ma voix quand elle disparaîtra. »

Jon Medved

Medved a déjà testé la technologie lors d’un appel Zoom avec une autre personne atteinte de SLA. L’expérience l’a profondément marqué : la barrière de la communication brisée grâce à l’intelligence artificielle.

OurCrowd et l’écosystème healthtech israélien

OurCrowd n’a pas investi dans la santé par hasard. Le fonds compte plus d’une soixantaine de sociétés dans le domaine médical et biotechnologique.

  • OncoHost : utilise l’IA pour prédire l’efficacité des immunothérapies contre le cancer.
  • Startups spécialisées dans le séquençage nouvelle génération du génome.
  • Solutions de gestion des maladies chroniques.
  • Outils d’analyse prédictive pour la médecine personnalisée.

Ces investissements reflètent une vision stratégique : la technologie peut transformer la prise en charge des pathologies complexes. Pour Medved, cette vision devient désormais concrète et personnelle.

Il confie que vivre avec une maladie grave change radicalement la perspective sur la santé. Ce qui était autrefois une cause philanthropique devient une nécessité vitale.

La résilience de la Startup Nation

Malgré les tensions géopolitiques et le conflit à Gaza, l’écosystème startup israélien reste incroyablement dynamique. Jon Medved le soulignait encore récemment : près de 15 à 16 milliards de dollars investis dans les startups du pays en 2025.

Le pays compte presque 100 licornes et excelle dans des domaines comme la cybersécurité, l’intelligence artificielle, les microprocesseurs ou encore la foodtech. La healthtech fait partie intégrante de cette excellence.

Cette résilience collective inspire Medved. Même retiré de la direction opérationnelle, il refuse de s’effacer complètement.

« Je suis loin d’avoir fini. Je veux continuer à contribuer, à OurCrowd et à l’écosystème en général. »

Jon Medved

Cette détermination illustre parfaitement l’esprit de la Startup Nation : transformer l’adversité en opportunité d’innovation.

L’avenir des avatars et de la voix synthétique pour les patients SLA

La technologie utilisée par Jon Medved n’est que la pointe de l’iceberg. Les avatars réalistes et les voix de synthèse progressent à une vitesse fulgurante grâce aux avancées en intelligence artificielle générative.

Pour les patients atteints de SLA, préserver la voix est une priorité psychologique majeure. Perdre la capacité de parler avec sa propre intonation peut être dévastateur pour l’identité et les relations sociales.

Des fondations comme celle de Peter Scott-Morgan – lui-même atteint de SLA et pionnier des technologies d’assistance – accélèrent le développement de solutions intégrées : avatars, interfaces cerveau-machine, exosquelettes.

En combinant D-ID et ElevenLabs, l’avatar de Medved atteint un niveau de réalisme impressionnant. Les gestes, les expressions faciales et la prosodie sont reproduits avec une fidélité qui rend les interactions presque indistinguables de la réalité.

Pourquoi cette histoire nous concerne tous

Au-delà du parcours personnel de Jon Medved, cette histoire interroge notre rapport à la technologie et à la vulnérabilité humaine.

Dans un monde où l’innovation est souvent perçue comme abstraite ou réservée à une élite, voir un investisseur de premier plan dépendre directement des fruits de ses choix d’investissement rappelle une vérité simple : la tech, quand elle est bien orientée, peut sauver des vies… ou du moins les rendre dignes et connectées.

Elle montre aussi l’importance d’investir dans la santé dès aujourd’hui. Les maladies rares ou neurodégénératives touchent des millions de personnes dans le monde. Chaque euro ou dollar investi dans une startup healthtech peut un jour faire la différence pour quelqu’un.

  • La SLA concerne environ 450 000 personnes dans le monde.
  • L’espérance de vie après diagnostic varie de 2 à 5 ans en moyenne.
  • Seuls quelques traitements ralentissent légèrement la progression.
  • Les technologies d’assistance (voix, mobilité) améliorent considérablement la qualité de vie.

Ces chiffres rappellent l’urgence d’innover dans ce domaine.

Le legs de Jon Medved pour la prochaine génération

Même s’il s’éloigne des projecteurs, Jon Medved laisse derrière lui un modèle d’investissement inclusif et visionnaire. OurCrowd a prouvé qu’on pouvait démocratiser le venture capital sans sacrifier la performance.

Son engagement dans la healthtech inspire désormais une nouvelle vague d’investisseurs sensibles aux impacts sociétaux. La crise personnelle qu’il traverse humanise profondément le métier souvent perçu comme froid et calculateur.

En partageant son expérience, il contribue à sensibiliser le grand public et les décideurs à la nécessité de soutenir la recherche sur les maladies neurodégénératives.

Son avatar, symbole de résistance technologique, continuera probablement à porter son message bien après que sa voix naturelle se sera tue.

Jon Medved incarne ainsi une forme d’immortalité numérique : ses idées, sa passion et son timbre vocal perdureront grâce aux outils qu’il a lui-même contribué à financer.

Cette histoire, à la croisée de la tragédie personnelle et de l’espoir technologique, nous rappelle que l’innovation n’a de sens que lorsqu’elle sert l’humain dans ses moments les plus fragiles.

Dans la Startup Nation, même face à l’adversité la plus cruelle, l’esprit d’entreprise et la créativité refusent de capituler.

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Steven Soarez
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