Imaginez la scène : vous êtes en décembre 2025, vous ouvrez votre iPhone flambant neuf acheté pour Noël, vous demandez à Siri de réserver un restaurant… et elle vous propose encore un numéro de 2018. Frustrant, non ? C’est pourtant la réalité que vivent des millions d’utilisateurs depuis le lancement chaotique d’Apple Intelligence. Et là, coup de tonnerre : Apple change son grand patron de l’intelligence artificielle.

Un départ qui faisait déjà jaser depuis des mois

John Giannandrea, l’homme qui avait été débauché de Google en 2018 pour « remettre Apple dans la course IA », quitte officiellement ses fonctions. L’annonce est tombée le 1er décembre 2025, soigneusement formulée : il « prend du recul » et restera conseiller jusqu’au printemps. En langage Apple, cela signifie généralement « merci et au revoir ».

Pourtant, les signes avant-coureurs étaient là. Dès mars 2025, Tim Cook avait déjà retiré Siri des mains de Giannandrea pour la confier à Mike Rockwell (le père du Vision Pro). La division robotique secrète d’Apple avait suivi le même chemin. Le message était clair : les résultats n’étaient pas au rendez-vous.

Amar Subramanya : l’homme qui connaît les armes des ennemis

À la place de Giannandrea arrive Amar Subramanya, un nom que peu de grand public connaît… mais que tous les ingénieurs IA de la Silicon Valley respectent. Son CV fait peur :

  • 16 ans chez Google, où il a dirigé l’ingénierie de Google Assistant puis de Gemini
  • Dernièrement chez Microsoft, où il travaillait sur les grands modèles d’IA intégrés à Copilot
  • Il a donc vu de l’intérieur les deux plus gros concurrents d’Apple dans l’IA générative

En clair, Apple vient de recruter quelqu’un qui sait exactement comment ChatGPT, Gemini et Copilot fonctionnent… et surtout pourquoi ils marchent mieux que Siri aujourd’hui.

« C’est comme si le PSG recrutait l’entraîneur du Real Madrid et du Bayern en même temps. »

Un ingénieur anonyme d’Apple Intelligence, cité par Bloomberg

Apple Intelligence : le lancement qui a fait pschitt

Rappelons les faits. Octobre 2024 : Apple lance en grande pompe Apple Intelligence. Les promesses sont énormes : un assistant enfin intelligent, des résumés de notifications, une génération d’images, une écriture assistée… Tout ça en mettant en avant la confidentialité (traitement sur l’appareil, pas de données envoyées dans le cloud).

Deux mois plus tard, le verdict est sans appel :

  • Le résumé de notifications invente des informations (fausses morts de suspects, vainqueurs de compétitions sportives avant la fin des matchs…)
  • La nouvelle Siri, promise pour avril 2025, est repoussée sine die après que Craig Federighi himself ait constaté que ça ne marchait pas
  • Des plaintes collectives sont déposées par des acheteurs d’iPhone 16 qui se sentent floués

Le surnom interne chez certains employés ? AI/MLess (jeu de mots sur « Aimless », sans but). Difficile de faire plus cruel.

Le paradoxe Apple : la privacy ou la performance ?

Voici le grand débat qui anime la Silicon Valley depuis deux ans. Apple a fait un pari fort : tout traiter sur l’appareil pour garantir la confidentialité absolue des données. Résultat : les modèles sont forcément plus petits, donc moins performants que les monstres de plusieurs centaines de milliards de paramètres qui tournent dans les data centers de Google, OpenAI ou Meta.

Lorsque la tâche est trop complexe, Apple bascule vers son Private Cloud Compute… mais là encore, les capacités restent limitées comparées à la concurrence.

CritèreAppleGoogle / OpenAI
Taille modèle principal~3-30B paramètres (on-device)500B à 1T+ paramètres
Données d’entraînementDonnées licenciées + synthétiquesInternet entier + données utilisateurs
ConfidentialitéExcellenteMoyenne à faible
Performance 2025En retardLeader

Et le comble de l’ironie ? Selon plusieurs sources concordantes, la prochaine version de Siri… tournera en partie sur Google Gemini. Oui, vous avez bien lu : Apple serait en train de négocier pour intégrer le modèle de son ennemi juré directement dans iOS. Quinze ans après les guerres sur les cartes, les navigateurs et les stores d’apps, voilà Apple obligé de s’asseoir à la table de Google.

Et maintenant ? Trois scénarios possibles

Avec l’arrivée d’Amar Subramanya, plusieurs chemins s’ouvrent à Apple :

  1. Le grand virage pragmatique : Apple assouplit sa doctrine « tout sur l’appareil » et signe des accords massifs (Gemini, peut-être Anthropic ou Meta Llama) pour booster Siri rapidement.
  2. Le pari du hardware : la puce A20 ou M5 (2026-2027) sera tellement puissante que les modèles on-device rattraperont enfin leur retard. Scénario préféré des fans hardcore d’Apple.
  3. Le scénario hybride (le plus probable) : Apple garde sa philosophie privacy-first pour 80 % des tâches, mais propose un mode « Pro » débridé (avec consentement explicite) qui envoie les requêtes complexes vers des partenaires externes.

Amar Subramanya, avec son expérience chez Google et Microsoft, semble être exactement la personne capable de piloter ce scénario hybride sans faire hurler les défenseurs de la vie privée.

Ce que ça dit du marché de l’IA grand public en 2025

Ce changement de direction chez Apple est un révélateur brutal : même la société la plus riche du monde, avec les puces les plus avancées et des centaines de milliards en cash, peine à suivre la cadence infernale de l’IA générative quand on impose des contraintes éthiques fortes.

Pendant ce temps :

  • OpenAI vient de lever 40 milliards de dollars et vise les 200 milliards de valorisation
  • Google a intégré Gemini dans tous ses produits (Search, Gmail, Maps, YouTube…)
  • Meta a ouvert Llama 4 en open source et domine l’IA open
  • Même Microsoft, avec Copilot, est perçu comme plus innovant que l’iPhone en 2025

Apple, autrefois synonyme d’innovation grand public, se retrouve dans la position inconfortable de celui qui doit rattraper son retard. Et ça, ça n’était pas arrivé depuis… l’époque pré-iPhone.

Conclusion : 2026 sera l’année de vérité

Amar Subramanya a six à douze mois pour réussir là où John Giannandrea a échoué. S’il parvient à livrer une Siri enfin digne du XXIe siècle tout en préservant (au moins en apparence) les valeurs de confidentialité d’Apple, il entrera dans la légende.

Sinon, 2026 pourrait être l’année où, pour la première fois depuis vingt ans, l’iPhone ne sera plus le smartphone que tout le monde veut… mais celui que tout le monde a déjà.

Une chose est sûre : la guerre de l’intelligence artificielle grand public ne fait que commencer. Et pour l’instant, Apple est en train de changer de général au milieu de la bataille.

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Steven Soarez
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