Imaginez une entreprise qui rêve de devenir la référence en matière de durabilité dans le monde des véhicules électriques, inspirée par une marque iconique comme Patagonia. Et puis, du jour au lendemain, la figure clé qui incarnait ce lien quitte le conseil d’administration. C’est exactement ce qui vient d’arriver à Rivian, cette startup ambitieuse qui fait trembler les géants de l’automobile.

Le départ de Rose Marcario, ancienne PDG de Patagonia, marque un tournant. Annoncé discrètement juste avant les fêtes de fin d’année, ce changement soulève des questions sur l’avenir de Rivian à l’approche d’une année décisive.

Un départ qui interpelle chez Rivian

Rose Marcario a officiellement démissionné de son poste au conseil d’administration de Rivian, avec une date effective au 1er janvier. Selon le communiqué déposé auprès des autorités boursières, elle souhaite se concentrer sur d’autres engagements. Rien de dramatique en apparence, mais le timing intrigue.

Arrivée en janvier 2021, juste avant l’entrée en bourse tonitruante de la société, Marcario apportait une crédibilité immense en matière de responsabilité environnementale. Sous sa direction chez Patagonia, l’entreprise était devenue un modèle de capitalisme conscient, avec des initiatives audacieuses comme le don de l’entreprise à une fondation pour le climat.

RJ Scaringe, le fondateur et PDG de Rivian, avait souvent répété vouloir faire de sa compagnie la Patagonia des véhicules électriques. Cette vision n’était pas qu’un slogan marketing : elle guidait les choix stratégiques, de la conception des véhicules à l’engagement sociétal.

Pourquoi ce départ maintenant ?

2026 s’annonce comme l’année de tous les enjeux pour Rivian. La commercialisation du R2, ce SUV plus abordable censé démocratiser l’accès aux véhicules électriques de la marque, doit débuter au premier semestre. Ce modèle est crucial : il vise un marché bien plus large que les actuels R1T et R1S, avec une production annuelle visée à plusieurs centaines de milliers d’unités.

Parallèlement, l’entreprise accélère sur les technologies de conduite autonome, avec des annonces récentes lors de son premier Autonomy & AI Day. Et n’oublions pas l’usine en construction en Géorgie, qui doit soutenir cette expansion massive.

Dans ce contexte de croissance intense, réduire le conseil d’administration de huit à sept membres peut sembler anodin. Mais perdre une voix aussi influente que celle de Marcario interroge sur la gouvernance et les priorités internes.

Nous tenons à la remercier pour sa contribution au conseil d’administration de Rivian au cours des cinq dernières années, et nous nous réjouissons de sa poursuite à la tête de la Rivian Foundation.

Porte-parole de Rivian

La continuité à la Rivian Foundation

Le départ n’est pas une rupture totale. Rose Marcario conserve son rôle de présidente du conseil des trustees de la Rivian Foundation. Créée juste avant l’IPO de 2021, cette fondation avait reçu 1 % des actions de la société pour faire de la nature un actionnaire à part entière.

Après des années relativement discrètes – le cours de l’action ayant fortement chuté après les sommets post-introduction – la fondation a commencé à distribuer des fonds significatifs. En 2024, 10 millions de dollars de subventions ont été annoncés, suivis de 2,6 millions supplémentaires cette année.

Aux côtés de RJ Scaringe, d’Anisa Kamadoli Costa (chief sustainability officer) et de l’acteur et conservationniste Edward Norton, Marcario continue donc d’influencer la dimension philanthropique de Rivian. C’est un signal fort : l’engagement environnemental reste au cœur du projet.

Rose Marcario : une trajectoire exemplaire

Pour comprendre l’importance de ce départ, il faut revenir sur le parcours de cette femme d’exception. Chez Patagonia pendant douze ans, elle a transformé une marque déjà engagée en véritable référence mondiale du business responsable.

Sous sa houlette, Patagonia a lancé des campagnes choc comme Don’t Buy This Jacket pour dénoncer la surconsommation, ou encore poursuivi en justice l’administration Trump pour la réduction de zones protégées. Elle a aussi piloté une croissance impressionnante tout en maintenant des standards éthiques élevés.

  • Direction financière puis opérationnelle chez Patagonia
  • PDG de 2014 à 2020
  • Multiplication du chiffre d’affaires tout en renforçant l’engagement écologique
  • Décision historique de léguer l’entreprise à une structure pour le climat

Son arrivée chez Rivian était vue comme un gage de sérieux sur les questions ESG (Environnement, Social, Gouvernance), particulièrement important pour une startup cotée en bourse.

Les défis actuels de Rivian

Le secteur des véhicules électriques traverse une zone de turbulences. La concurrence s’intensifie, les marges restent fragiles, et les investisseurs deviennent plus exigeants sur la rentabilité. Rivian, malgré des produits acclamés par la critique, doit encore prouver sa capacité à scaler massivement.

Le R2 représente l’espoir d’atteindre enfin la profitabilité. Positionné autour de 45 000 dollars, il cible le cœur du marché américain des SUV. Mais les retards de production, les problèmes de chaîne d’approvisionnement et la nécessité d’investissements colossaux pèsent lourd.

Dans ce contexte, la composition du conseil d’administration joue un rôle crucial. Perdre une expertise en gestion durable au moment où l’entreprise doit équilibrer croissance rapide et responsabilité pourrait sembler contre-intuitif.

Quel impact sur la stratégie de Rivian ?

Le départ de Marcario ne change pas fondamentalement la trajectoire de l’entreprise. La vision Patagonia-like est profondément ancrée dans l’ADN de Rivian, portée par RJ Scaringe lui-même et renforcée par des équipes dédiées à la durabilité.

Cependant, il pourrait signaler une maturation de la gouvernance. À mesure que Rivian passe du statut de startup prometteuse à celui d’industriel établi, les profils au conseil évoluent. Plus de focus sur l’exécution opérationnelle et la finance, peut-être moins sur l’idéalisme pur.

La fondation reste un outil puissant pour maintenir l’engagement sociétal sans alourdir la structure principale. C’est une séparation intelligente entre business et philanthropie, permettant à Rivian de naviguer plus agilement dans un marché compétitif.

Perspectives pour l’industrie EV

Cette nouvelle illustre les tensions propres aux entreprises technologiques engagées. Comment concilier ambition écologique et impératifs de croissance capitalistique ? Rivian, comme Tesla avant elle, doit trouver cet équilibre délicat.

Les investisseurs valorisent de plus en plus les résultats concrets. La patience accordée aux visions long terme s’amenuise. Pourtant, la différenciation par les valeurs reste un atout majeur dans un secteur qui risque l’uniformisation.

Le maintien de Marcario à la fondation montre que Rivian ne renie pas ses racines. C’est plutôt une réorganisation pragmatique pour affronter les défis industriels à venir.

Conclusion : un nouveau chapitre pour Rivian

Le départ de Rose Marcario ferme une page importante de l’histoire de Rivian. Celle où l’inspiration Patagonia était omniprésente. Mais il ouvre aussi un chapitre de maturité, où l’entreprise doit prouver qu’elle peut allier performance économique et responsabilité environnementale à grande échelle.

2026 sera décisif. Le succès du R2, l’avancée des technologies autonomes et la santé financière détermineront si Rivian parvient à s’imposer durablement. Une chose est sûre : même sans Marcario au conseil, l’héritage de durabilité qu’elle a contribué à bâtir continuera d’influencer la trajectoire de cette startup emblématique.

L’industrie des véhicules électriques évolue à toute vitesse. Rivian, avec ses ambitions et ses valeurs, reste un acteur à suivre de très près dans les mois qui viennent.

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Steven Soarez
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