Imaginez un monde où les géants du cloud ne se contentent plus de louer les puces Nvidia à prix d’or. Un monde où Amazon fabrique ses propres monstres de calcul, plus rapides, moins gourmands… et bientôt capables de discuter avec les GPU de Nvidia comme de vieux amis. Ce monde n’est plus de la science-fiction : il a pris vie le 2 décembre 2025 lors de la conférence AWS re:Invent.

Ce jour-là, Amazon a présenté Trainium3. Et franchement, les chiffres donnent le vertige.

Trainium3 : la nouvelle arme fatale d’AWS

Depuis plusieurs années, Amazon développe en secret ses propres puces d’entraînement IA. Gravées en 3 nm, les Trainium3 ne sont pas une simple évolution : c’est un bond générationnel brutal.

Voici ce qu’il faut retenir en quelques chiffres qui font mal :

  • 4 fois plus rapide que Trainium2 pour l’entraînement et l’inférence
  • 4 fois plus de mémoire par puce
  • Jusqu’à 1 million de puces Trainium3 interconnectables dans un seul cluster (10x plus que la génération précédente)
  • 40 % d’efficacité énergétique en plus – crucial quand on sait qu’un data center IA moderne consomme autant qu’une ville moyenne
  • Un UltraServer embarque 144 puces et sa propre interconnexion maison

Concrètement ? Des startups comme Anthropic (dans laquelle Amazon a investi plusieurs milliards), Karakuri au Japon ou encore Decart ont déjà divisé par deux, voire trois, leurs coûts d’inférence. Et quand on sait que l’inférence représente 80 à 90 % des coûts d’exploitation d’un modèle IA, l’impact financier est colossal.

« Avec Trainium3, nous avons réduit nos coûts d’inférence de 65 % tout en augmentant la qualité de nos réponses. »

Un porte-parole d’Anthropic, client historique d’AWS

Pourquoi l’efficacité énergétique change tout

On parle beaucoup de performances, mais le vrai sujet de 2025-2030, c’est l’énergie. Les data centers IA engloutissent des quantités folles d’électricité. Microsoft a déjà dû relancer des centrales nucléaires. Google signe des contrats avec des réacteurs modulaires. Meta construit ses propres centrales gaz.

Dans ce contexte, gagner 40 % d’efficacité énergétique n’est pas un argument marketing : c’est une question de survie compétitive.

AWS l’a bien compris. En réduisant la consommation, Amazon baisse ses coûts opérationnels… et peut proposer des prix plus agressifs que ses concurrents qui restent 100 % dépendants des puces Nvidia (H100, H200, Blackwell).

Trainium4 : le coup de génie stratégique

Mais le plus malin est ailleurs. Lors de la keynote, AWS a teasé Trainium4… et a lâché une phrase qui a fait tousser les analystes :

« Trainium4 sera compatible NVLink Fusion de Nvidia. »

Traduction : les futures machines Trainium4 pourront mélanger puces Amazon et GPU Nvidia dans le même cluster, avec une interconnexion ultra-rapide made in Nvidia. C’est historique.

Pendant des années, Nvidia a verrouillé l’écosystème avec CUDA. Presque tous les grands modèles (Llama, GPT, Claude, Gemini) sont optimisés CUDA. Migrer sur une puce concurrente demandait des mois, voire des années de travail.

Avec Trainium4, Amazon dit aux startups et aux entreprises : « Gardez votre code CUDA, ajoutez simplement nos puces moins chères dans votre cluster. Vous payez moins, vous consommez moins, et vous gardez Nvidia si vous en avez vraiment besoin. »

C’est la stratégie du cheval de Troie parfaite.

Comparaison Trainium3 vs Nvidia Blackwell (les chiffres qu’on a)

CritèreTrainium3 (2025)Nvidia B200 (Blackwell)
Performance FP8 (relatif)4x Trainium2~5x H100
Efficacité énergétique+40 % vs Trainium2+25 % vs H100 (estimé)
Prix instance EC2 (estimation)~2,10 $/h (cluster)~5 à 8 $/h (H100 actuel)
Compatibilité CUDA nativeNon (mais frameworks compatibles)Oui
DisponibilitéDès maintenant2025-2026

Attention : les chiffres Nvidia Blackwell ne sont pas encore totalement publics, mais les estimations des analystes placent Trainium3 très compétitif, surtout sur le ratio performance/watt/dollar.

Et les startups dans tout ça ?

Pour une startup française ou européenne qui lève 10 à 50 millions d’euros, le coût du cloud représente souvent le premier poste de dépense. Passer de 500 000 $ par mois à 150 000 $ grâce à Trainium3 change complètement la runway.

Exemples concrets déjà annoncés :

  • Anthropic : migration massive de Claude sur Trainium3
  • SplashMusic : génération musicale 3x moins chère
  • Decart : réduction de 70 % des coûts d’inférence
  • Karakuri (Japon) : premier grand modèle japonais entraîné presque exclusivement sur Trainium

Et ce n’est que le début. Avec Trainium4 et sa compatibilité NVLink, on risque de voir une vague de migrations massives en 2026-2027.

Ce que ça change pour l’écosystème français

En France, Mistral AI a déjà signé un partenariat stratégique avec Microsoft Azure. Mais beaucoup de scale-ups (LightOn, Dust, Photoroom, H, etc.) restent sur AWS ou envisagent la migration.

Trainium3 leur offre une troisième voie : rester sur AWS, réduire drastiquement les coûts, et garder la souveraineté sur leurs données (important avec le Cloud Act et les débats européens).

Plus besoin de choisir entre la performance Nvidia et le prix Google TPU. Amazon propose désormais les deux… en mieux marché.

Conclusion : la fin du monopole Nvidia ?

Nvidia reste leader incontesté en 2025. Mais pour la première fois, une alternative crédible, moins chère et bientôt hybride émerge.

Trainium3 n’est pas qu’une puce. C’est le signal que le duopole (Nvidia + TSMC) qui domine l’IA depuis 2020 commence à vaciller.

Et quand on sait qu’Amazon investit plus de 100 milliards de dollars par an dans AWS et ses puces maison… la guerre ne fait que commencer.

2026 s’annonce explosive.

Et vous, pensez-vous que Nvidia gardera sa couronne ? Ou Amazon vient-il de déclencher la plus grande disruption depuis l’invention du GPU moderne ?

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Steven Soarez
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