Et si la prochaine grande révolution minière ne venait plus des foreuses, mais des étoiles ? C’est exactement ce qui se passe en ce moment au Québec, où une startup australienne vient de démontrer qu’on peut détecter des gisements géants de lithium… depuis l’espace.

Le 25 novembre 2025, Fleet Space Technologies a annoncé une découverte qui fait déjà trembler le petit monde de l’exploration minière : un dépôt potentiellement titanesque de 329 millions de tonnes d’oxyde de lithium, repéré grâce à une constellation de nanosatellites et une bonne dose d’intelligence artificielle.

Fleet Space : quand le New Space rencontre l’exploitation minière

Créée en 2015 à Adelaide, en Australie, Fleet Space n’a rien d’une entreprise minière traditionnelle. Son cœur de métier ? Mettre des satellites en orbite pour écouter la Terre comme personne ne l’avait fait auparavant.

Leur technologie repose sur un principe aussi simple qu’ingénieux : combiner plusieurs types de capteurs embarqués (électromagnétiques, gravimétriques) avec une transmission ultra-rapide des données via leur propre constellation. Résultat : des cartes 3D du sous-sol en quelques jours au lieu de plusieurs mois.

Là où une campagne d’exploration classique demande des centaines de forages coûteux et destructeurs, Fleet Space propose une première passe non invasive capable de réduire drastiquement le nombre de trous nécessaires. Et ça change absolument tout.

Le projet Cisco : 329 millions de tonnes… et ce n’est qu’un début

Le projet concerné se situe dans la région d’Eeyou Istchee Baie-James, au nord du Québec. Le partenaire de Fleet Space, la junior minière Cisco, travaillait déjà sur un gisement prometteur. Mais ce que les satellites ont révélé dépasse toutes les attentes.

« Les résultats indiquent un potentiel à l’échelle d’un district entier. Ce que nous voyons dépasse largement les limites actuelles du projet. »

Fleet Space Technologies

329 millions de tonnes d’oxyde de lithium, c’est énorme. À titre de comparaison, cela représente potentiellement plus que l’ensemble des réserves mondiales actuellement déclarées par certains grands producteurs. Et surtout, cette estimation reste conservative : les anomalies détectées s’étendent bien au-delà des claims actuels.

Comment fonctionnent vraiment ces satellites « qui voient sous terre » ?

Contrairement à l’imagerie optique classique, les satellites de Fleet Space utilisent la tomographie passive. En clair : ils écoutent les signaux électromagnétiques naturels émis par la Terre et les variations du champ gravitationnel.

  • Capteurs EM qui détectent les zones conductrices (souvent liées aux fluides riches en lithium)
  • Gravimètres ultra-sensibles repérant les variations de densité
  • Transmission des données en temps quasi réel via le réseau satellite de Fleet
  • Traitement par une IA propriétaire qui génère des modèles 3D exploitables en 48 heures

Le vrai coup de génie ? Tout se passe en orbite basse (entre 500 et 600 km) avec des nanosatellites de quelques kilogrammes seulement. Le coût de mise en orbite devient dérisoire comparé aux campagnes géophysiques aériennes traditionnelles.

Pourquoi le lithium, et pourquoi maintenant ?

Le timing est presque trop parfait. La demande mondiale de lithium explose avec l’électrification massive des transports. Les prévisions les plus sérieuses tablent sur un déficit structurel dès 2027-2028.

Dans ce contexte, chaque nouvelle découverte compte. Mais le problème reste le même depuis des décennies : trouver du lithium viable rapidement et à moindre coût. Les méthodes classiques (forages systématiques, géophysique au sol ou par hélicoptère) sont longues, chères et souvent décevantes.

Fleet Space apporte une réponse radicale : passer de plusieurs années à quelques semaines pour qualifier une cible. Et surtout, réduire le risque financier à chaque étape.

Les avantages concrets pour les compagnies minières

On parle souvent d’innovation, mais ici les bénéfices sont très tangibles :

  • Réduction du nombre de forages de prospection jusqu’à 90 %
  • Délais de décision ramenés de mois à jours
  • Diminution massive de l’empreinte environnementale (moins de routes, moins de déboisement)
  • Coûts divisés par 5 à 10 sur la phase d’exploration préliminaire
  • Possibilité de scanner des zones inaccessibles (toundra, zones protégées)

Pour une junior minière comme Cisco, c’est une véritable bouffée d’oxygène. Au lieu de brûler des millions en forages aléatoires, elles peuvent désormais cibler avec une précision chirurgicale.

Et l’impact environnemental dans tout ça ?

C’est peut-être le point le plus intéressant. L’exploration minière est souvent montrée du doigt pour son impact sur les écosystèmes fragiles. Or, la méthode de Fleet Space inverse complètement la logique.

Moins de forages ratés = moins de perturbation du sol. Moins de routes temporaires dans la forêt boréale. Et surtout, une capacité à éviter les zones sensibles dès le départ grâce à une vision globale du sous-sol.

Dans le contexte québécois, où les relations avec les communautés cries sont cruciales, cette approche « light footprint » pourrait bien devenir un argument décisif.

La concurrence s’organise déjà

Fleet Space n’est pas seule sur ce créneau. D’autres acteurs comme KoBold Metals (soutenu par Bill Gates et Jeff Bezos) misent aussi sur l’IA pour l’exploration. Mais la combinaison satellite + IA en temps réel reste pour l’instant unique.

La startup australienne a déjà signé des contrats sur quatre continents et annonce vouloir multiplier par dix la taille de sa constellation d’ici 2027. L’objectif : couvrir l’ensemble des ceintures lithinifères mondiales avec une résolution toujours plus fine.

Ce que cette découverte dit de l’avenir de l’exploration

Le succès du projet Cisco n’est pas qu’une belle histoire de startup. C’est surtout la preuve qu’une rupture technologique majeure est en train de s’opérer sous nos yeux.

Dans les cinq prochaines années, il est probable que plus aucune grande découverte minière ne se fasse sans une passe préalable par satellite ou drone géophysique. Les compagnies qui refuseront cette évolution risquent tout simplement de disparaître.

Et pour les investisseurs ? Le message est clair : les technologies d’exploration sont en train de devenir aussi stratégiques que les gisements eux-mêmes.

On assiste peut-être à la naissance d’un nouveau secteur : le Mining Space Tech. Et Fleet Space vient d’en poser la première pierre… depuis l’orbite terrestre.

La course au lithium propre ne fait que commencer. Mais grâce à quelques satellites et beaucoup d’intelligence (artificielle et humaine), elle vient de changer de dimension.

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Steven Soarez
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